V - Le p'tit chaperon rouge et les oreilles du loup.

Le loup s'empressa ensuite, d'enfiler la chemise de nuit que la grand-mère avait volé l'an passé au Monoprix,  et se coucha dans le lit, pour imiter la mère-grand. Un moment après, alors que le loup s’était fait chauffé une deuxième bouilloire de vin à la cannelle, il entendit taper à la porte
« Qui k’es là ? » dit-il d’une voix chevrotante. « C’est les pompiers pour le calendrier ma bonne dame ! »« Allez vous faire foutre, bande de feignasses », claironnât-il en ricanant. Après les pompiers, il y eut le facteur et les éboueurs et ils se firent tous virer, sans ménagement. Enfin, Ambroisine arriva, fraîche comme une laitue. Elle balança son panier contre la porte, exprès.
« k’y k’eédonc là ? »dit le loup déguisé en mère-grand.
« C’est moi, Ambroisine, enfin : le PCR ! »
« j’hallucine se dit le loup, c’est quoi ça encore PCR ? ».
Il questionna la gamine, qui tapait dans la porte, elle en avait marre de poireauter près de la chevillette, qui ne chutait point.
« Oh mère-grand ! Ouvre vite, j’ai des provisions et même, j’ai un pétard pour toi ! PCR, c’est un sigle pour "Ptit Chapron Rouge".
Le loup tira la bobinette et la chevillette chut.

La gamine se précipita vers le lit « On n’y voit goutte ici » dit-elle pour montrer qu’elle connaissait ses classiques.
" Je sais je sais, ERDF m’a coupé le jus ma pov’ ’tite fille ", dit le loup en geignant comme une vraie mère -grand. La petite s’assit sur le coin du lit et remarqua « comme tu as de grandes oreilles grand-mère ! " " C’est pour mieux t’entendre mon enfant " rétorqua le loup qui avait lu les contes de Perrault. Il y a en principe des questions graduelles dans le conte mais le Petit Chaperon rouge n’avait pas l’intention de coucher là alors, elle posa, direct, la question finale, celle qui tue !
« Que tu as de grandes dents ! Grand-mèreeeeeeeeeee » et le loup qui ne s’attendait pas à cette question tout de suite, il avait appris son texte dans l’ordre, en avala son dentier ! Merde, il s’étouffait et toussait…

Le chaperon rouge, charitablement, s’empressa d’appeler les pompiers, mais les pompiers qui s’étaient fait jeter avec leur calendrier des vœux, envoyèrent la mère-grand se faire flamber chez Satan. Le petit chaperon aurait bien appeler le facteur mais elle n’avait pas noté son numéro perso, puis le facteur n’était pas docteur !
Elle décida de patienter en mangeant la galette.
Tout à coup : surgit la mère-grand, en petite culotte, un peigne de traviole dans ses cheveux défaits.
« Dis donc la gamine, te gêne pô, bouffe donc ma galette ! » hurla mère-grand, en colère.
« Et toi le loup, barre-toi de mon lit ! », et elle arracha le loup du lit, d’une poigne ferme.

Le petit chaperon rouge détestait les conflits, elle offrit une tournée de vin chaud bouillant et remplaça la cannelle par de la vodka.
La grand-mère se mit à chanter l’internationale, s’assit sur les genoux du loup et tous les deux, avec Ambroisine, fumèrent un de ces fameux cigares au hakique, dont la petite avait le secret !

Ce fut une super soirée de réveillon de l’an.

Moralité : Comme ne l’a pas écrit Perrault :

Les chaperons rouges ne sont pas de la même sorte,
Il en est d’une humeur accorte
Sans bruit, sans fiel et sans courroux
Mais hélas ! qui ne sait que ces chaperons doucereux,
De tous les chaperons sont les plus dangereux.